"Voilà pourquoi le débat français est important. Derrière l’intitulé
quelque peu boboïsant de « mariage pour tous » se cache le fond
philosophique d’un combat visant à en finir avec ce que les traditions
nous ont pris de liberté. Reprendre cette liberté n’empêche pas de
garder tout ce qui, dans les traditions et les religions, inspire et
élève à la spiritualité. Mais il faut rester intransigeant face à ceux
qui estiment que leur doctrine, quelle qu’elle soit, est celle de
l’ordre du monde et que la nature est de leur côté. Les opposants au
mariage pour tous sont des gens qui veulent continuer à avoir peur ;
peur de Dieu, peur du noir, peur du chaos, peur que l’histoire n’ait pas
de sens déterminé. C’est pour cela qu’il n’y a que dans la tradition,
le passé, l’ordre du monde qu’ils trouvent du sens à la vie. Ils
trouvent dans la chaleur du dogme une nature qu’ils croient de leur
côté. Ils y trouvent de quoi affronter ce qu’ils estiment sincèrement
être la décadence, au lieu d’investir dans l’avenir et dans cette
extraordinaire liberté qu’a l’homme devant lui.
Or, si la peur
est une opinion individuelle respectable, elle ne peut pas servir de
guide pour des choix collectifs. En l’occurrence, il ne faut pas
sous-estimer la portée universelle de ce débat, dans chaque pays où il
se posera. L’enjeu du mariage et de l’adoption pour tous, ce n’est pas
d’ouvrir des droits à une communauté en la nommant gay ou lesbienne ;
c’est au contraire de ramener tout le monde dans le même giron humain,
celui des citoyens libres et égaux."
par François De Smet