De la magie flotte autour de nos modestes carcasses. De cela, beaucoup ont l’intuition. Naomi Wolf (dans The Beauty Myth) parle de ce rayonnement que chacun peut observer chez les autres : « Certains le verront dans la sexualité d’un corps ; d’autres, dans la vulnérabilité, ou dans l’humour. Il émane souvent du visage de quelqu’un qui raconte une histoire, ou qui écoute intensément. Beaucoup ont remarqué comment l’acte de création semble illuminer les gens, et ont noté que ce rayonnement enveloppe la plupart des enfants — ceux à qui on n’a pas encore dit qu’ils n’étaient pas beaux. » Et, pourtant, cette aura n’a pas de réalité officielle : la société « en limite sévèrement la description ». On l’accorde aux mariées et aux jeunes ou aux futures mères, c’est-à-dire uniquement à celles « qui font don de leur corps à un homme ou à un enfant », et on la refuse aux hommes. Cette clandestinité permet à l’industrie cosmétique de vendre aux femmes « une imitation de la lumière qui est déjà la leur, de la grâce essentielle dont nous n’ayons pas le droit de dire que nous la voyons ».
Beauté fatale. Les nouveaux visages d’une aliénation féminine, Mona Chollet, 2012, p.186-187.